L’assassinat de George Floyd a réveillé la gauche et la jeunesse, y compris en Autriche qui n’a presque pas connu de manifestations depuis le début de la pandémie du Covid-19. Après quelques actions plus limitées, plus de 50 000 manifestants sont descendus dans les rues de Vienne le 4 juin. Ce fut une des plus grandes manifestations de ces derniers temps en Europe contre le racisme et les violences policières. Depuis, des manifestations plus petites ont lieu presque tous les jours, et elles se rendent fréquemment à l’ambassade des États-Unis à Vienne. Entretemps, il y a également eu des meetings et manifestations dans presque toutes les capitales régionales.
Même si le déclencheur de ce mouvement se trouve aux États-Unis, l’Autriche a sa propre histoire concernant les violences policières racistes. Les contrôles aux facies sont devenus monnaie courante. Des personnes qui ne sont pas nées en Autriche sont plus souvent condamnées à des peines de prison que les autres. Ces peines sont aussi plus longues que celles d’Autrichiens ayant commis le même délit. Les prisons sont surpeuplées, bien que le taux de criminalité est en baisse depuis des années, à l’exception de la délinquance économique et de la cybercriminalité.
Depuis 1999, au moins huit Noirs sont morts en Autriche lors d’interventions policières ou d’expulsions. Le premier cas est tristement célèbre : Marcus Omofuma. Au fil des ans, la pression du mouvement antiraciste est devenu tellement importante qu’un monument a dû être érigé pour lui dans le centre de Vienne. Il est souvent le point de départ de manifestations antiracistes. Ce qui est également significatif pour la force du mouvement contre le racisme et les violences policières est le fait que la voiture policière qui précédait le cortège affichait en lettres lumineuses « Black Lifes Matter ». Compte tenu de l’esprit de corps de la police autrichienne qui ne supporte aucune critique venant de ses propres rangs, la policière responsable n’aura dorénavant, malgré son rang élevé dans la hiérarchie, certainement pas la vie facile.
En Autriche non plus, le racisme ne se laisse pas réduire à des cas isolés. Celui-ci est un problème structurel qui s’est aggravé notamment depuis que le FPÖ (Parti de la liberté, extrême droite, NDT) a commencé dans les années 1990 une traque systématique contre les étrangers. Beaucoup de positions défendues par le FPÖ ont entre-temps été reprises par pratiquement tous les autres partis, notamment le ÖVP, le parti de l’actuel chancelier autrichien. Lors d’un récent sondage parmi ses adhérents, la social-démocratie a également présenté comme tout à fait normal le mot d’ordre « intégration plutôt que nouvelles arrivées ». Ceci montre que la distinction perverse entre les « bons » réfugiés politiques et les « méchants » réfugiés économiques a été implantée même au sein du mouvement ouvrier. La question de savoir quelle est la différence entre quelqu’un tué par balles ou qui meurt de faim n’est pas une question posée par les élites.
Il est d’autant plus impressionnant avec quelle évidence surtout des jeunes refusent le racisme et ignorent la phrase martelée par la droite « Au temps du corona, il est irresponsable d’aller à des manifestations ».
Aufwiderstand on Social Media